Avec une croissance de 18% sur l’année 2017 en France, le secteur du jeu vidéo est devenu le plus gros mastodonte du divertissement dans le monde. Ce succès ne doit rien au hasard : les développeurs ne se contentent pas d’améliorer le contenu de leurs jeux, ils sont aussi particulièrement actifs en matière d’innovation économique.

Le passe de combat de Fortnite, avec ses récompense gratuites (haut) et premium (bas).

 
Après les DLC* et tous les systèmes de micro-transaction ayant abouti aux loot boxs, la tendance est à la fidélisation massive grâce au “pass de combat”, avec en pionnier inarrêtable Fornite d’Epic games.
 
Le battle pass d’Epic Games
Prenant la forme d’une échelle de 100 niveaux, le battle pass permet aux joueurs de valoriser leur progression en leur offrant des cosmétiques normalement payant pour leur personnage (apparence, planeurs, skin d’arme) en fonction du niveau atteint sur l’échelle. Cette dernière existe en deux versions : une gratuite avec très peu de récompenses et l’autre payante avec une ou plusieurs récompenses à chaque palier. La version payante vous octroie de plus un bonus d’expérience, vous permettant d’atteindre le palier 100 beaucoup plus rapidement.
 
La fidélisation en charnière du Battle pass
La subtilité de ce modèle repose sur 3 points. Tout d’abord, le pass de combat est limité dans le temps et correspond à une saison du jeu (environ 2 mois). Certaines récompenses ne peuvent être récupérées que par celui-ci. Si vous arrivez à la fin de la saison sans avoir complété votre Battle Pass, vous pourrez faire une croix sur l’acquisition de certaines récompenses rares.
Dans un second temps, une fois votre premier battle pass acquis pour une dizaine d’euros en V-Bucks (la monnaie du jeu), vous pourrez, en empilant les niveaux, acquérir un niveau suffisant de cette monnaie virtuelle pour prendre le pass de combat de la saison suivante.
Enfin élément moindre, la réalisation de quêtes quotidiennes vous rapporte un nombre non négligeable de points d’expérience, mais cela vous contraint à vous connecter tous les jours. Il est à noter que ces quêtes ne sont pas indispensables pour terminer le Battle Pass mais donnent un sacré plus.


La carotte et le bâton
La recette est simple : jouez suffisamment et régulièrement et vous pourrez payer votre prochain battle pass et accumuler les récompenses, ou échouez à récolter suffisamment de V-Bucks pour vous procurez le prochain pass. Vous devrez alors à nouveau mettre la main à la poche ou passer au pass gratuit, dont le niveau de récompenses est sans commune mesure avec le pass payant.
Il est possible, pour les plus dépensiers, d’acheter des niveaux et ainsi s’assurer de terminer le pass et d’obtenir ses récompenses. En revanche, le terminer en partant du palier 0 peut s’avérer extrêmement chronophage et demander aux joueurs un investissement de plusieurs dizaines d’heures de jeu.

Le choix semble payant pour Epic dont Fortnite explose tous les records en terme d’utilisateurs. D’autres éditeurs ont choisi d’emprunter la formule magique comme Psyonix, éditeur de Rocket League avec son Rocket Pass (Ci-dessus à gauche), et le hero shooter d’Hi-Rez Paladins et son Battle Pass (ci-dessus à droite). Ces derniers se révèlent néanmoins plus frileux qu’Epic Games en utilisant une formule hybride entre Battle pass et Loot box, là où Epic ne propose tout simplement pas de Loot box.
 
Se pose en conclusion la question de l’incitation à jouer. À l’heure où l’OMS a fait le choix de classifier le gaming en addiction potentielle, il faut se demander si de tels systèmes n’encouragent pas des volumes de jeu trop important pouvant nuire à la vie professionnelle et sociale des joueurs.

Epic Games ne semble en revanche pas se poser de telles questions, tant la cash machine Fortnite rapporte. Mais, il est à parier que de nombreuses autres questions d’éthiques seront à poser dans le secteur du jeu vidéo dans les années à venir.
 
*DLC : Download content, correspond au contenu additionnel facultatif téléchargeable pour un jeu, le plus souvent contre un paiement.