Fin février, des milliers de Turcs manifestaient dans la rue. Le Premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan, était accusé de corruption après la diffusion d’enregistrements impliquant son entourage. Après sa menace de fermer Youtube et Facebook, il a déclaré vouloir « supprimer Twitter ». Depuis vendredi, les internautes turcs qui tentent de se connecter sur Twitter sont détournés vers un communiqué des autorités télécoms turques.

21 mars 2014 (photo by REUTERS/Dado Ruvic)

« Je me moque de ce que pourra dire la communauté internationale », a lancé Erdogan lors d’un rassemblement électoral  pour les élections municipales du 30 mars.  Avec un aplomb surprenant, il affirme que la censure du réseau social n’a « rien à voir avec les libertés ». Selon lui, la sécurité de son pays est en jeu. Le premier ministre Turc devrait revoir sa copie. L’interdiction d’un réseau de communication comme Twitter est un acte qui condamne certaines libertés fondamentales telles que la liberté d’expression, la liberté de presse, la liberté d’information, etc.
Finalement, cette décision fait directement écho à la diffusion des enregistrements l’accusant clairement de corruption. Une cybercensure avait déjà été évoquée début mars par le chef du gouvernement conservateur turc : « Nous sommes résolus à ne pas laisser le peuple turc être esclave de Youtube et Facebook ». Le premier ministre soutient que ces réseaux s’immiscent dans la vie privée et que ce sont des outils d’espionnage des secrets d’Etat sur la scène internationale. Neelie Kroes, commissaire européenne en charge des nouvelles technologies, a dénoncé le blocage de Twitter « L’interdiction de Twitter en Turquie est sans fondement, inutile et lâche. Le peuple turc et la communauté internationale verront cela comme une censure. Ce qui est bien le cas. ».
Le président turc, Abdullah Gül, s’est également vivement opposé à son Premier ministre en diffusant un tweet sur son compte personnel : « La fermeture complète des réseaux sociaux ne peut être tolérée ». Ce n’est pas la première fois qu’il contredit le Premier ministre. Le président turc avait déjà exprimé son désaccord lors de la menace d’interdiction de Facebook et YouTube.
La déclaration intervient peu de temps après que le parlement turc ait adopté le 5 février  2014 une série d’amendements controversés qui renforcent le contrôle de l’Etat sur Internet. Les dispositions visaient officiellement la protection de la famille, des enfants et de la jeunesse. Cette loi avait été dénoncée comme liberticide par l’opposition turque et par de nombreuses associations.
Un blocage facilement contournable
A l’échelle d’un pays, bloquer totalement un site Internet n’est pas facile. Le site Twitturk donne des statistiques des tweets en langue turque. Le site indique que le nombre de tweets a battu des records malgré le blocage de Twitter passant de 1.8 millions de tweets par jour à 2.1 millions lors de l’interdiction.
Comment cela est-il possible ? Les internautes ont rapidement trouvé des moyens de contourner l’interdiction.
Certains d’entre eux utilisent des serveurs VPN. C’est une sorte d’ordinateur intermédiaire qui permet de contourner le blocage. En se connectant à un autre ordinateur hors de la Turquie, celui-ci va servir d’intermédiaire pour « faire croire » que l’utilisateur vient d’un autre pays et ainsi déjouer la limitation d’accès.
D’autres utilisent les réglages DNS. Un DNS est une sorte d’aiguillage qui permet d’orienter les connexions sur Internet. Le principe est que l’internaute s’adresse aux serveurs DNS de son fournisseur d’accès Internet afin d’obtenir le chemin vers le site demandé. Ainsi, si on modifie les réglages, cela peut empêcher le fournisseur d’accès de savoir que l’utilisateur va sur Twitter.
Il existe également des applications tierces qui permettent de se connecter à Twitter sans être bloqué comme l’application « Onadio ». Plus surprenant et même bienvenue, Twitter offre une aide de service à ses utilisateurs turcs. En effet, le service de microblogging a mis en place une procédure qui permet aux utilisateurs turcs de tweeter par SMS ce qui évite le blocage du réseau internet.
Selon le site Engelli Web, il y a actuellement en Turquie 40 733 sites qui ont été bloqués par les autorités. Reporters Sans Frontières accuse le pays de faire des fournisseurs d’accès « des instruments de censure et de surveillance, les forçant à rejoindre une nouvelle organisation qui centralise les demandes de blocage et de suppression de contenus ».
La Turquie se classe deuxième, derrière les Etats-Unis, pour ce qui est de l’usage des réseaux sociaux en général, selon le quotidien Türkiye. Et elle arrive en tête en ce qui concerne Twitter, avec 31,10 % d’internautes abonnés au réseau, juste devant le Japon (28%).
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Roland MÉRELLE
Passionné par les nouvelles technologies, la communication/marketing, la propriété intellectuelle, ainsi que  la création de sites web et leurs référencements.
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A propos de Roland Mérelle