Le 10 décembre 2012, l’Union européenne s’est enfin montrée capable de s’« unir dans la diversité » en mettant fin à une période grise de 30 ans pendant laquelle aucun accord sur le projet du brevet unique européen n’a pu aboutir. Un pas fondamental a ainsi été marqué en matière de propriété industrielle en Europe.
Le dernier Conseil de l’Union, ayant eu lieu le 6 et 7 décembre 2012, a abouti à trouver une solution concernant la création du brevet unique européen convenant à presque tous les Etats membres. Cet accord constitue une avancée considérable pour l’Europe mais surtout un évènement qui facilitera significativement la vie des entreprises européennes et notamment celle des PME.
Quid de la situation jusqu’alors ? Si une personne physique ou morale voulait déposer un brevet à l’échelle européenne, outil qui existe en Asie et aux Etats-Unis depuis longtemps, elle devait s’adresser à l’Office européen des Brevets (OEB) ayant son siège à Munich. Mais la nomination du brevet obtenu était pour autant peu trompeuse, parce que l’intéressé ne recevait pas un brevet unique valable sur tout le territoire de l’Union (comme c’est le cas sur les territoires susmentionnés), mais il recevait les quelques brevets nationaux souhaités parmi les 27 Etats membres. La seule facilité pour l’inventeur était que l’OEB servait d’intermédiaire dans les démarches administratives. Or, cela a nécessairement un impact négatif sur la compétitivité des entreprises européennes à l’échelle mondiale. De plus, cette situation bloquante coûtait extrêmement cher à celles-ci car elles étaient obligées d’acquitter une somme pouvant aller jusqu’à 36 000 euros contre les 2 000 euros payés aux Etats-Unis.
Voilà pourquoi les autorités européennes faisaient de leur mieux afin de rétablir ce déséquilibre compétitif. Mais l’aboutissement d’un tel projet semblait peu évident à 27. Les deux problèmes majeurs qui se posaient lors des discussions étaient bien évidemment la traduction des brevets, qui, comme tout le monde sait, fait partie des dépenses les plus excessives de l’Union (à l’heure actuelle cette dernière dispose de 23 langues officielles). Le second problème résidait dans la décision concernant la localisation de la juridiction traitant le contentieux des brevets. Et cela, pendant plus de 30 ans…
Or, la nouvelle de l’accord au sein de l’institution la plus solennelle de l’Union, à savoir le Conseil, est enfin tombée le 10 décembre dernier. Ceci dit, ledit accord reflète bien les interminables désaccords qui le précédaient et représente ainsi un compromis ultime. Le Conseil a décidé que le siège de la juridiction compétente concernant des litiges éventuels, ainsi que le bureau de son président, seront installés à Paris. L’administration de sa part travaillera à Munich près de l’OEB. Enfin, des chambres spécialisées dans les différents domaines brevetables seront réparties dans trois pays comme il suit :
- La chambre spécialisée dans le textile et l’électricité se trouvera à Paris ;
- La chambre compétente en ingénierie et mécanique sera installée à Munich ;
- Enfin, la chambre accueillant les brevets en matière de pharmacie, chimie et métallurgie aura son siège à Londres.
Selon Michel Barnier, cette utopie de la propriété industrielle pourra voir le jour dès janvier 2014, mois où pourra être déposé le premier brevet unique européen. A noter quand même que ce dernier sera valide pour les 27 Etats membres actuels, à l’exclusion de l’Italie et de l’Espagne qui n’ont pas voulu adhérer au projet pour des raisons essentiellement linguistiques.
Le 12 décembre 2012, le vote du texte en question a été inscrit à l’ordre du jour du législateur européen. Celui-ci a été adopté par le Parlement malgré les vives critiques dont il fait actuellement l’objet.