Alors que Descartes ne rêvait même pas encore d’internet, il formula une hypothèse bien intéressante, appelée « malin génie ». Celui-ci serait une sorte de force extérieure qui brouillerait notre esprit. Les cookies, installés sur nos ordinateurs des énièmes de fois par seconde seraient en quelque sorte l’incarnation électronique de ce « malin génie ». Alors que, de plus en plus, la réalité de l’homme nouveau internaute est fondée sur internet, il se fait néanmoins piéger par des génies du marketing en ligne. 20 ans après l’ouverture du web au grand public, la publicité en ligne a fourni en 2013 un chiffre d’affaires mondial de plus de 102 milliards de dollars.

Le Malin génie cookie Source image : https://farm6.staticflickr.com/5189/5762345557_159d47408e.jpg

Le cookie : fiche descriptive

Les cookies sont de simples codes en ligne déposés sur notre navigateur par les sites web que l’on visite et qui permettent ensuite à des publicités ciblées de s’afficher sur notre écran, à côté des pages web ou simplement dans une nouvelle fenêtre. Le cookie sert à identifier et pister l’internaute dans son parcours en ligne, retenir d’éventuels mots de passe, gérer les paniers d’achats, etc. Par ce suivi méticuleux, le cookie parvient à déterminer le profil de l’internaute cible. Le cookie crée des fichiers personnalisés qui seront stockés dans des bases de données. Ainsi, il connaîtra mieux l’internaute de manière à lui proposer les publicités qui lui correspondent le mieux.
Ces petits codes ont de plus une santé en fer. L’internaute pourra les supprimer autant de fois qu’il le souhaitera : à chaque nouvelle connexion sur un navigateur, de nouveaux cookies infiltrent notre ordinateur. Les cookies d’Amazon, par exemple ont été conçus pour durer au moins jusqu’en 2037.
Plusieurs entreprises, comme Criteo font ce qu’on appelle du « reciblage publicitaire ». Leur devoir consiste à identifier un internaute, contacter la plate-forme qui gère ses espaces publicitaires, proposer un prix, conclure l’affaire et lancer l’affichage de la bannière. Ce rituel doit être accompli en 13 centièmes de seconde, faute de quoi l’espace sera vendu à une autre entreprise.
Criteo fait partie des entreprises moyennes avec 20 téraoctets (vingt mille milliards) de données par jour, touchant 850 millions d’internautes par mois. On ne pourrait alors imaginer l’ampleur des chiffres de Google par exemple. Ce dernier possède plus d’un million de serveurs dans le monde. Des mathématiciens ont inventé une nouvelle unité de compte, le zettaoctet (mille milliards de milliards) pour parvenir à rendre compte de cette réalité.
 
La création de profils
Les profils d’internautes seront crées à partir des croisement des cookies avec d’autres données récoltées sur internet, comme l’adresse IP, la langue usuelle, les requêtes inscrites sur des moteurs de recherche, le modèle de l’ordinateur avec lequel on travaille, le type de notre carte de crédit, etc. Ces croisements peuvent parfois même inclure des données provenant du monde réel, tout comme les relevés de cartes bancaires, des tickets de caisse, le déplacement de notre téléphone, etc.
Des sociétés, comme Acxium, vendent des informations tirées du monde réel aux annonceurs de profils. Le tirage se fait selon 250 critères, entre lesquels « fait de la couture », « héberge un parent âgé » ou « possède un chat ». Le prix moyen d’un fichier avec les données de bases de mille personnes atteint 60 centimes. Pourtant, un ensemble de profils détaillés peut être vendu jusqu’à 250€. Celui-ci peut contenir les données spécifiques d’un laboratoire pharmaceutique ou une liste d’adultes obèses ayant déjà acheté des produits amincissants.
Toutes les données sont anonymes, car les ordinateurs n’ont pas besoin de nom pour parfaitement nous connaître. Ils se basent sur nos revenus, nos loisirs, notre sexe, notre âge, notre métier, notre code postal, nos maladies, notre situation familiale, notre religion ou encore nos voyages.
Avec des informations aussi détaillées, le ciblage va même jusqu’à nous manipuler en réajustant les prix à notre profil. Ainsi, si nous recherchons le prix d’un voyage, en passant d’un site à un autre, le site concurrent va ajuster son prix de manière à être plus avantageux, quitte à se rattraper sur les frais de dossier. De même, si l’on navigue sur un ordinateur plus cher que l’ordinaire, les prix des chambres seront automatiquement plus élevés.
 
Vers une indépendance technique : les algorithmes auto-apprenants
Le progrès technique a permis de mettre sur pied une « analyse prédicative ». Au lieu d’agir en réaction aux internautes, les publicitaires veulent les prévoir afin d’agir par anticipation. Le « machine learning » permettant cela est encore en phase expérimentale. Ce projet très attendu par les publicitaires est une sorte d’apprentissage automatique, branche de l’intelligence artificielle. Le but est de doter les ordinateurs de la capacité à améliorer leurs performances sans intervention humaine. Le système pourra ainsi, par exemple détecter qu’un embouteillage est en train de se former dans la périphérie parisienne et en conclure que les Parisiens arriveront chez eux plus tard, ce qui décalera leur usage d’internet.
L’internaute devient donc une sorte de marionnette des ordinateurs intelligents qui arrivent à traquer nos faits et gestes en ligne, tout en analysant profondément nos envies, nos besoins et nos futurs achats. L’étude marketing en ligne va encore plus loin avec les travaux du mathématicien Erick Alphonse de l’Université Paris XIII, qui est en train de mettre au point un système nommé « Predictive Mix ». Avec cette nouvelle méthode de ciblage, les publicitaires arriveront à classer leurs cibles dans différentes catégories : les internautes ayant besoin de publicités pour acheter, ceux que les publicités en ligne font fuir, ceux qui achètent sans publicités, etc. Ceci perfectionnera encore plus les moyens mis au point à travers les cookies et fera augmenter convenablement le chiffre d’affaires des sociétés publicitaires, investissant plus dans des profils adaptés et laissant à leurs libres volontés les internautes qui de toute façon ont un penché pour les achats en ligne.
La question se pose : quels sont les avantages et les désavantages d’une telle procédure publicitaire pour le consommateur en ligne et jusqu’où iront les géants du web pour traquer nos envies les plus enfouies ?
 

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Fabio MARTINS-CERQUEIRA
Étudiant en M2 Commerce électronique, passionné de nouvelles technologies, de sport et de tout ce qui touche au monde des communications/marketing.
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