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Dans quatre arrêts rendus le 12 juillet 2022, la Cour de cassation vient d’aligner le droit français sur le droit européen en jugeant que les articles 60-1, 60-2, 77-1-1 et 77-1-2 du code de procédure pénale sont contraires au droit de l’Union européenne.

La police peut-elle librement accéder aux données de connexion ?

En d’autres termes, la Cour de cassation considère que le Procureur de la République, ou un officier de police judiciaire agissant sous son contrôle, ne peut requérir la communication des données de connexion de la part d’un opérateur puisqu’en application du droit européen : « il est essentiel que l’accès des autorités nationales compétentes aux données conservées soit subordonné à un contrôle préalable effectué soit par une juridiction, soit par une entité administrative indépendante, susceptible d’assurer un juste équilibre entre, d’une part, les intérêts liés aux besoins de l’enquête dans le cadre de la lutte contre la criminalité grave, et, d’autre part, les droits fondamentaux au respect de la vie privée et à la protection des données à caractère personnel. ».

En effet, pour rappelle, dans son arrêt du 2 mars 2021 la Cour de justice de l’union européenne (CJUE) a précisé que l’accès aux données de connexion ne peut être autorisé que :

  • Si ces données ont été conservées conformément aux exigences du droit européen (i.e. RGPD);
  • s’il a eu lieu pour la finalité ayant justifié la conservation ou une finalité plus grave, sauf conservation rapide ;
  • s’il est limité au strict nécessaire ;
  • s’agissant des données de trafic et de localisation, s’il est circonscrit aux procédures visant à la lutte contre la criminalité grave ;
  • s’il est soumis au contrôle préalable d’une juridiction ou d’une entité administrative indépendante.

Par conséquent, en appliquant les principes du droit européen à la procédure pénale française la Cour de cassation a rappelé que le Procureur de la République n’est pas une juridiction de sorte qu’il ne pouvait autoriser l’accès aux données de connexion.

Toutefois, la Cour de cassation rappelle que le juge d’instruction est autorisé à accéder aux données de connexion puisque, à l’inverse du Procureur de la République, il n’est pas une partie à la procédure mais il est lié à une juridiction qui statue sur les demandes formées par les parties qui disposent d’un recours en cas de refus et qu’il n’exerce pas l’action publique.

Nul doute que ces décisions vont sensiblement compliquer le travail d’enquête et d’investigation des force de l’ordre, cependant cela illustre à nouveau la prépondérance du droit européen sur le droit français.

A propos de Bilge Esin Dinceroglu

En stage de fin d'études chez Marvell Avocats sous direction de Maitre Géraldine CAMIN Étudiant en Master 2 Droit de l'économie numérique promotion 2021-2022