Référencement : Bataille entre « pro life » et partisans de la loi Veil autour des requêtes concernant l’IVG.
IVG.net Vs IVG.gouv.fr
Une polémique est née en ce début janvier sur les réseaux sociaux. En effet, des internautes se sont aperçus que les requêtes Google autour du mot IVG voyaient apparaître en premier résultat un site non officiel. IVG.net est un site aux allures de site d’information prodiguant des conseils, il est en réalité très orienté pro life. Il est administré par une association anti IVG prônant « la vie ». Ce site est habilement construit comme étant une source d’information mais il se révèle « culpabilisateur » et essaye de convaincre la « poursuite de la grossesse ».

Mauvais référencement d'IVG.gouv (selon les jours entre la 2ème et la 4ème place)
Mauvais référencement d’IVG.gouv (selon les jours entre la 2ème et la 4ème place)

Le ministère de la santé a pourtant, depuis 2013, un site d’information explicatif et objectif : IVG.gouv.fr . Les internautes se sont émus de l’affaire en considérant dangereux qu’un site partisan arrive en tête des requêtes et puisse être consulté par des personnes en état de fragilité. En 2014 une affaire similaire avait vu le jour et le site officiel était remonté dans la liste des sites. On avait alors pensé que Google était intervenu pour améliorer le référencement du site officiel.
Plusieurs associations féministes, magazines féminin et internautes ont décidé de partir en guerre et de permettre au site institutionnel IVG.gouv.fr de remonté en tête des recherches Google.
 
Appel lancé par le magazine Causette
Appel lancé par le magazine Causette

Un coup d’épée dans l’eau
Le magazine féminin « Causette » a demandé aux internautes via les réseaux sociaux de se mobiliser pour améliorer le référencement, en cliquant sur le site pour augmenter son trafic et en partageant son URL sur les réseaux sociaux. Les réactions n’ont pas manqué et les internautes se sont fortement mobilisés voulant bien faire. Même la ministre de la santé Marisol Touraine a relayé cet appel aux clics. Malgré la bonne volonté des internautes, ceux-ci ne sont pas spécialiste en SEO. Certain ne sachant même pas de quoi il s’agissait. Un bémol est à noté, et non des moindres, tous ces actes sont quasi inefficaces. Pire leurs actions a même été improductive et pourrait causer l’effet inverse à celui recherché.
Tweet de la ministre de la santé relayant l'appel lancé aux internautes
Tweet de la ministre de la santé relayant l’appel lancé aux internautes

Plusieurs erreurs ont été commises dans la volonté de faire remonter le site IVG.gouv. La première étant de penser que les clics faisaient remonter un site sur Google. Bien que le trafic d’un site est l’un des très nombreux critères pris en compte par les algorithmes Google (plus de 200 critères) le fait de cliquer plusieurs fois sur le même site n’a aucun impact car c’est toujours la même adresse IP qui est prise en compte. Le fait que des milliers d’internautes soient allés sur le site peut avoir une incidence minime sur le référencement mais une fois cette action faite le nombre de visite va s’effondrer. Il s’agit donc là d’une mesure de court terme et d’une efficacité très limitée. Pire encore le fait de cliquer sur un site pour en ressortir aussitôt peut être une mauvaise chose car les algorithmes peuvent déduire que ce taux de rebond est dû au fait que le site n’est pas en lien avec la requête ce qui est négatif pour son référencement. Les internautes ont aussi voulu mettre en place une autre technique de référencement en publiant des liens vers IVG.gouv.fr sur les réseaux sociaux. Les liens entrants sont une partie non négligeable du référencement, mais malheureusement les liens posté sur les réseaux sociaux ne sont pas pris en compte par les robots, les blogs ou sites internet eux sont bien sur éligible à cette pratique de publication de lien. Les liens n’ont pas le même poids selon le site qui les publie. Les sites qui sont reconnu par Google comme faisant autorité (site gouvernementaux, de presse, site de référence) ont plus de poids que les autres, de même les sites ayant des thèmes communs ont plus de poids dans le référencement.
Pour améliorer le référencement la meilleur solution est que les responsables du site mettent en place une stratégie de SEO. Cela sera bien plus efficace que la bonne volonté des internautes. Malheuresement le site du gouvernement est bien loin d’être un bon élève en matière d’optimisation de son site pour le référencement.
 
Les erreurs du site officiel du gouvernement
Une chose est sûre le ministère de la santé a des lacunes dans sa stratégie de référencement, cette erreur est imputable aux concepteurs et aux responsables du site.
La première grosse erreur se cache dans le code HTML du site.
La H1, absente, qui est le nom d’une balise très importante dans le référencement, c’est cette balise qui donne le titre principal de la page, c’est à dire le sujet principal du site mais il n’apparait que des balises H2 sur le site.
Deuxième erreur, la pauvreté du champ lexical du site IVG.gouv. Le mot avortement n’est pas cité une seule fois, pourtant les algorithmes prennent en compte les mots clés et la richesse du champ lexical relatif à la requête. Les mots clés ne sont pas optimisés.
Le codage est aussi en cause en termes d’architecture du site certaine page comporte le code d’erreur 404 sans aucune redirection. Ce genre de code d’erreur peut porter préjudice pour le référencement.
La politique de lien entrant du site IVG .gouv est trop peu exploitée par rapport aux possibilités qui s’offrent lui. En effet le site IVG.gouv a environ 50 fois moins de liens entrant que le site IVG.net. Pourtant s’agissant d’un site officiel du gouvernement, il pourrait aisément bénéficier d’une politique de lien venant des autres sites de l’état français, qui seraient surement considérés comme faisant autorité. Les liens entrant existant ne contiennent pas de mot clé, ce qui peut être préjudiciable.
Les dernières mises à jour des algorithmes Google ont mis l’accent sur le contenu et sa qualité. Le site officiel est peu mis à jour, le contenu étant important, la publication d’article et une mise à jour régulière pourrait booster le référencement. Cela pourrait augmenter le nombre de page référencée et permettre d’être présent sur des requêtes très variées.
Epilogue
Au début de l’affaire le site du gouvernement était situé à la deuxième place lors d’une requête « IVG » sur Google, depuis les choses ont changé. Le site du gouvernement n’est plus toujours placé en 2ème place lors de l’écriture de cette article il oscillait entre la 4ème place (derrière IVG.net, l’article Wikipédia de l’IVG, et un forum Doctissimo le 15/01/2016) et la 2ème. Cette chute à la 4ème place n’est-elle pas dû au mouvement sur les réseaux sociaux et les appels aux clics ? Comme nous l’avons dit plus haut ils peuvent être préjudiciables au référencement en cas de taux de rebond important, mais c’est une hypothèse invérifiable car les algorithmes Google restent encore trop secrets pour l’affirmer.
Le ministère de la santé, devant la mobilisation et l’écho médiatique, a annoncé que le site IVG.gouv allait être mise à jour avec des améliorations.
Le ministère a aussi décidé de se lancer dans une campagne Adwords (il avait pourtant renoncé à cette possibilité en 2014) sur certaines requêtes autour de l’IVG (« Information IVG » « IVG info » par exemple).
Campagne AdWord
Campagne AdWord

Cette campagne place le site en tête des requêtes avec un lien sponsorisé. Mais l’utilité de la pratique est discutable car des sites concurrents en font de même, IVG.net le premier, ainsi que d’autre site anti IVG. Cette solution est discutable car elle coûte chère et n’est pas efficace sauf si elle fait partie d’une campagne de communication globale. De l’argent public est dépensé, c’est une question de surenchère car les sites contre l’IVG sont bien financés et peuvent aussi se permettre de dépenser de l’argent pour apparaitre en tête des requêtes. Dans les deux cas l’argent public est dépensé car l’association gérant IVG.net est reconnue d’utilité publique elle reçoit possiblement des subventions et les dons de particulier sont déductible sur l’impôt sur le revenu.
 
photo Mehdi BougaultMehdi Bougault
Étudiant en Master 2 Commerce Électronique au sein de l’Université de Strasbourg après avoir suivi un parcours en science de gestion, passionné de marketing et de stratégie notamment dans le monde du digital et du numérique.