La BCE (Photo by Ralph Orlowski/Getty Images)
La BCE à Francfort, Allemagne (Photo by Ralph Orlowski/Getty Images)

 

La pandémie du COVID-19 a démontré quelques grandes failles du système financier traditionnel des billets de banque, à savoir la transmission d’un pathogène mais également l’impossibilité de payer en ligne. La nécessité d’un compte bancaire semble inévitable, avec un parfait traçage des transactions, pourrait une monnaie digitale de banque centrale devenir une réelle alternative aux solutions financières existantes ?

Qu’est-ce qu’une monnaie digitale de banque centrale ?

Une monnaie digitale de banque centrale (MDBC) est une devise virtuelle émis par une banque centrale, ayant la même valeur que la devise nationale, le plus souvent utilisant la technologie de cryptographie de la DLT (Distributed ledger technology), la même technologie qu’utilisent les monnaies virtuelles sur la blockchain comme Bitcoin.

Il s’agit d’argent liquide virtuel, émis et contrôlé par une entité centrale, à savoir les banques centrales. Contrairement à l’argent liquide, lequel est distribué par une banque commerciale au public, ces MDBC sont distribuées directement par les banques centrales. Cette idée d’une monnaie digitale n’est pas nouvelle, le Digital Dollar de la Federal Reserve aux Etats-Unis ainsi que le Digital Yuan en Chine ont été annoncés il y a quelques années déjà. La Banque centrale européenne a également poussée vers le Digital Euro avec l’émergence des systèmes de paiement alternatifs du secteur privé comme Alipay.

Les atouts des monnaies digitales de banques centrales

Comme l’argent liquide est de moins en moins utilisé, avec l’Allemagne comme un des seuls pays en Europe l’utilisant encore majoritairement, une monnaie virtuelle laquelle ne nécessite pas un compte bancaire ou des cartes de paiement, semble être une réelle alternative d’inclusion financière. La monnaie virtuelle sera stockée sur un porte-monnaie numérique, un « wallet », comparable au système de stockage des cryptomonnaies avec des clés de chiffrement, lequel permet l’échange en temps réel et sans connexion internet. Il suffira d’avoir par exemple un téléphone, lequel pourra utiliser la connexion Bluetooth ou la technologie NFC pour la transmission de monnaie digitale. En comparant ce système aux virements bancaires, il est évident que la monnaie digitale est nettement supérieure en termes de rapidité des transactions ainsi qu’une réduction des frais.

De même, pour les défenseurs de l’argent liquide, cette monnaie digitale ne sera pas stockée sur un compte bancaire, ni détenue par un tiers. En outre, les transactions effectuées ne font pas objet de traçage par une banque et sont en théorie anonymes.

Plus important : La valeur de cette monnaie digitale sera garantie par une banque centrale, ce qui évite la volatilité des cryptomonnaies, 1 euro digital aura toujours la valeur d’un euro.

Les risques de cette technologie

Un risque majeur pourrait être la réduction des fonds des banques commerciales, lesquelles ne pourront plus émettre des crédits pour faire fonctionner l’économie provoquant potentiellement une crise bancaire. De même, la question des intérêts sur les fonds en MDBC se pose.

Avec une vision plus critique, une monnaie digitale de banque centrale pourrait-elle créer un effet de boule de neige de disparition des institutions financières privées ? Edward Snowden a appelé les MDBC de « devise crypto-fasciste » expliquant qu’une MDBC pourrait placer une entité centrale, l’Etat, au centre de toute transaction. Pour lui, seule une solution décentralisée comme les cryptomonnaies sur la blockchain pourrait réellement garantir les promesses de sécurité des MDBC.

De même, cette monnaie digitale centralisée pourrait être la cible d’attaques virtuelles ou réelles. Qu’il s’agisse de cyberattaques majeures, de vol des clés physiques ou des bugs, il est certain que les débuts de cette technologie ne seront peut-être pas très simples.

L’argent liquide est un garant certain d’anonymité et de protecteur de la vie privée, est-ce qu’une MDBC aura suffisamment de privacy et  security by design, pour faire concurrence à la fiabilité de l’ancien système ?

 

– Cédric Hack Rollmann