Les réseaux sociaux comme Twitter connaissent leur lot quotidien de polémiques au sein desquelles s’affrontent différentes visions du monde. Mais si ces outils sont depuis longtemps d’incontournables rouages de la communication politique, les élus peuvent-ils faire le tri entre leurs supporters et leurs détracteurs ?
Aux États-Unis, le Président Donald TRUMP a fait de Twitter son canal de diffusion privilégié face aux médias traditionnels. Mais celui-ci n’hésite pas à bloquer des utilisateurs peu enclins à goûter son approche et souvent prolixes en matière de moqueries, détournements, et critiques de son action.
Cependant, ces blocages ont fait l’objet d’une contestation judiciaire menée collectivement par sept utilisateurs et le Knight First Amendment Institute de l’Université de Columbia, spécialisé dans la défense de la liberté d’expression qui figure dans le 1er Amendement.
Les plaignants avancent que Twitter est « forum de débat public » et qu’une exclusion de ses utilisateurs serait constitutive d’un abus. Elle est appuie son raisonnement sur une jurisprudence de la Cour suprême américaine et affirme que « lorsque le gouvernement rend disponible au grand public un espace dédié à une activité expressive, il crée un forum public dont il ne peut exclure constitutionnellement les individus sur le fondement de leur point de vue ». Un raisonnement pouvant être accueilli favorablement par les juges du tribunal de New-York si l’on s’en tient aux déclarations de l’ancien porte-parole de la Maison blanche, Sean Spicer, qui a affirmé que les tweets de Donald TRUMP pouvaient être considérés comme des déclarations officielles du président américain.
Les déboires de l’administration TRUMP avec Twitter ne sont pas nouveaux. En mars dernier, le département de la sécurité intérieure avait demandé à Twitter de lui fournir l’identité d’un compte jugé trop véhément à l’égard du locataire de la Maison blanche. Mais une levée de boucliers avait contraint les autorités américaines à reculer.
Et en France ?
Les politiques, même élus, sont nombreux à bloquer leurs opposants, mais à ce jour, aucune procédure similaire a été intentée devant les juridictions françaises.
Il faut dire que la conception française de la liberté d’expression est différente de l’approche étasunienne. Pour cette dernière, des propos injurieux peuvent être tenus sans faire l’objet d’une sanction, à l’exception de très rares cas balisés par les juges. Il est cocasse de noter que le Président TRUMP bénéficie allègrement de cette liberté. En effet, il cumule plus de 300 insultes publiées sur son compte comme le rappelle le compteur du journal New York Times.
Sur les territoires de la République française, si l’article 11 de la DDHC (1789) qui garantit la liberté d’expression, a valeur constitutionnelle, celui-ci est sous le coup d’une série d’exceptions.
Ainsi, la loi Pleven (1972) interdit toute « provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence ». La loi Gayssot (1990) punit la tenue de tout « acte raciste, antisémite ou xénophobe » et incrimine le négationnisme. La loi Taubira (2001) encadre la liberté d’expression en lui proscrivant tout propos faisant l’apologie de la traite et de l’esclavage. Plus récemment, l’article 421-2-5 du Code Pénal ou l’apologie du terrorisme constitue une autre entaille.
Une affaire judiciaire de plus à suivre quant à l’usage fait par nos élus des réseaux sociaux et la défense de l’accès par les citoyens au débat public.