Rendre les nouvelles technologies accessibles aux personnes en situation de handicap permet à ces personnes d’accéder à de nombreuses ressources sans discrimination. Qu’entend-on par ces termes ?  

Il s’agit principalement à faire en sorte que l’écosystème numérique soit utilisable par toute personne qui en éprouverait le besoin, indépendamment de leur handicap ou de leur pathologie, que le handicap soit physique ou mental. Pour cela, les utilisateurs doivent pouvoir avoir accès à toutes les données, de façon lisible, claire, et intelligible et cela passe par l’utilisation de nouvelles technologies, mais également par des adaptations pensées pour ces utilisateurs, qui ne doivent pas avoir à pâtir de leur situation. En utilisant ce type de technologies, le but est alors d’assister les personnes en situation de handicap, en leur permettant d’outrepasser les difficultés pouvant être rencontrées durant la navigation internet, mais aussi plus généralement, lors de l’utilisation d’un ordinateur. Le but ici est de permettre aux utilisateurs de jouir des mêmes bénéfices, qu’ils se servent de leur écosystème numérique sur leur lieu de travail, ou chez eux.  

Cela passe par des aides à l’autonomie, qui peuvent être versées par les départements, et peuvent aider les particuliers et les entreprises à s’équiper, mais aussi par une accessibilité de l’environnement numérique via certaines bonnes pratiques. L’État a mis en place un RGAA, ou Référentiel général d’amélioration de l’accessibilité, afin de donner des directives aux entreprises ainsi qu’aux institutions. Sont ainsi concernés par cette obligation les services de communication au public en ligne des organismes suivants : 

  • Les personnes morales de droit public 
  • Les personnes morales de droit privé délégataires d’une mission de service public, ainsi que celles créées pour satisfaire spécifiquement des besoins d’intérêt général ayant un caractère autre qu’industriel ou commercial dont l’activité est majoritairement financée, gérée ou dont  plus de la moitié des membres de l’organe d’administration, de direction ou de surveillance sont désignés, par les deux personnes mentionnées plus tôt,  
  • Les personnes morales de droit privé constituées par une ou plusieurs des personnes mentionnées plus tôt pour satisfaire spécifiquement des besoins d’intérêt général ayant un caractère autre qu’industriel ou commercial 
  • Les entreprises à compter d’un seuil de chiffre d’affaires de 250 millions d’euros calculé pour chaque personne sur la base de la moyenne du chiffre d’affaires annuel réalisé en France des trois derniers exercices comptables clos antérieurement à l’année considérée. 

En revanche, ne sont pas concernés les services de communication au public en ligne : 

  • Des fournisseurs de services de médias audiovisuels 
  • Des organismes de droit privé à but non lucratif qui ne fournissent ni des services essentiels pour le public, ni des services répondant spécifiquement aux besoins des personnes handicapées ou destinés à celles-ci.
 LE HANDICAP : C'EST QUOI ? Le saviez-vous ? 24% de la population active est en situation de handicap, entre 15 et 64 ans Un handicap souvent peu visible : 80% des handicaps ne sont pas immédiatement visibles 5 grandes familles de handicaps reconnus Aujourd'hui, les différents handicaps sont regroupés en fonction de leur origine et des effets qu'ils entraînent. MOTEUR - Difficultés à se mouvoir, à effectuer certains gestes, parfois à communiquer SENSORIEL - Troubles visuels et auditifs, allant de légers à profonds ... INTELLECTUEL - Limitations de la compréhension, de la conceptualisation, de la communication PSYCHIQUE - Troubles de la personnalité affectant le comportement et la pensée MALADIES INVALIDANTES - Maladies pouvant entraîner un état de fatigue important et une réduction de l'activité : cancer, VIH, sclérose en plaques. Qui peut être considéré comme travailleur handicapé ? 2.51 millions de personnes ont une reconnaissance administrative de leur handicap et bénéficient de l'obligation Emploi. Qui sont les bénéficiaires concernés par l'obligation d'emploi ? Selon la loi, depuis 2005 : Les personnes ayant une reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé Les victimes d'accidents de travail ou de maladie professionnelle (permanent à au moins 10%) et titulaires d'une rente. Les titulaires d'une pension d'invalidité réduisant au moins de 2/3 leur capacité de travail;, Les pensionnés de guerre ou assimilés (veuves de guerre, orphelins de guerre, sapeurs-pompiers) Les titulaires de la carte d'invalidité Les titulaires de l'Allocation Adulte 5 Handicapé
©Ministère de l’Education Nationale de la Jeunesse et des Sports

L’accessibilité numérique, oui, mais pour qui ?   

Un français sur sept est en situation de handicap, selon un rapport du CNSA de 2021, lui-même basé sur les chiffres INSEE de 2008. Ces handicaps peuvent prendre des formes variées, et être physiques et sensoriels, mentaux, ou encore toucher aux deux formes de façon grave. On parle alors de polyhandicaps -s’il s’agit de deux handicaps modérés on parle alors de plurihandicaps-. Ce qui signifie qu’à handicaps différents, des solutions différentes sont nécessaires.  L’accessibilité numérique est donc essentielle à toutes les personnes présentant un handicap ou une invalidité, afin de leur permettre de mieux s’orienter et tirer le meilleur parti de leur expérience numérique. 

Pour la vue, SignBook, créée en 2018 par Anas Shtiwi, avec le soutien technique d’Orange en Jordanie, permet d’aider les personnes sourdes et malentendantes à accéder à un plus haut niveau de bénéfices sur le plan du numérique : la communication vidéo en temps réel avec un interprète en langues des signes arabe, la transcription du scan d’un code barre en vue d’accéder aux informations concernant une médication ou encore la traduction et publication des dernières actualités. L’application a été fortement poussée auprès des services de téléphonie ou encore des banques, pour être ensuite proposée aux utilisateurs.  

D’autres services existent, parmi lesquels Signs@Work, qui est un dictionnaire pour la LSF, Confort+, une solution visant à améliorer l’accessibilité lors de la navigation en ligne, la police d’écriture Accessible-DfA, qui est un dispositif open source visant  à permettre aux personnes atteintes de cécité partielle ou totale, ainsi qu’aux personnes dyslexiques de lire plus facilement. Des sites web recensant les outils en open source visant à faciliter l’accessibilité existent également, à l’instar de technologie-handicap-accessibilité, et permettent de dresser un état de l’art du domaine.  

Des craintes persistantes 

Il semble cependant important de veiller à ce que le numérique se développe sans devenir un facteur de discrimination ou encore d’exclusion de certaines franges de la population. Cela passe par la mise en valeur du principe d’accessibilité par défaut, comme défendu par la W3C Web accessibility initiative.  Le Comité interministériel du Handicap de 2013 a d’après le site dédié au handicap du gouvernement, « mobilisé des instruments incitatifs, de régulation et de conviction, qui ont largement fait avancer la réflexion et nous ont conduit aujourd’hui à passer à l’étape de nouvelles obligations pour les acteurs publics et privés et de nouvelles technologies au service de l’accessibilité numérique. » 

Cependant, les attentes sont réelles et légitimes : toute personne quelle que soit sa situation doit pouvoir bénéficier du même niveau d’accessibilité, à fortiori au sein d’une société qui se digitalise de plus en plus. Les articles 105 et 106 de la loi pour une République numérique, fruits d’un travail de collaboration entre parlementaires et milieux associatifs, ont permis la création d’obligations nouvelles sur le plan des communications électroniques, mais également de la fourniture de services en ligne.  L’article 105 concerne la garantie d’une accessibilité téléphonique du service public pour les personnes sourdes et malentendantes, mais aussi aux services clients des entreprises les plus importantes, et enfin, la mise à disposition par les opérateurs de télécoms d’une offre de services adaptée. L’article 106 garantit quant à lui l’accessibilité des services en ligne tels que les sites web ou encore les logiciels et applications des services publics et des entreprises les plus importantes. Cette accessibilité doit être mentionnée sur le site web.

Des possibilités à explorer

Seuls 5 à 10 % de la production éditoriale française est adaptée aux personnes en situation de handicap, selon un article de Vanessa Van Hatten, Conservatrice en chef des bibliothèques, chargée de mission Publics empêchés à la Direction générale des médias et des industries culturelles (Service du livre et de la lecture) du ministère de la Culture et de la Communication. Ces chiffres désolants n’ont pas été améliorés par la mise en place en 2010 de l’Exception handicap au droit d’auteur. Cette exception au droit d’auteur permet à des organismes à but non lucratifs de réaliser et de communiquer aux personnes en situation de handicap des versions adaptées d’œuvres protégées sans avoir à en demander les droits aux titulaires des droits et droits voisins, ni à les rémunérer.

Les versions adaptées peuvent être des livres en braille, des livres adaptés aux dys- ainsi qu’aux malvoyants, des œuvres en relief ou encore des vidéos en langue des signes, etc. Le cadre de la consultation de ces versions adaptées est cependant strictement personnelle, et réservée aux bénéficiaires de l’exception. On peut ainsi espérer une amélioration de l’accès à l’offre culturelle pour les publics en situation de handicaps, à fortiori les personnes porteuses de troubles dyslexiques, dyspraxiques ou encore dysphasiques, qui étaient très largement exclus, tout comme les personnes malvoyantes. Les offres de titres disponibles devraient également être en forte augmentation, via la mutualisation du travail d’adaptation des associations agréées, telles que la Médiathèque Valentin Haüy, leur projet Eole, et leur liste de bibliothèques et médiathèques partenaires qui œuvrent pour la démocratisation des ouvrages à destination des personnes présentant une déficience visuelle, ou encore l’INJA, qui propose sa Base de Données Adaptée permettant d’accéder au répertoire des organismes proposant des adaptations et de filtrer par éditeur ou encore par support.