Cela va faire un an que Facebook a annoncé l’existence de son projet « DeepFace », un programme de reconnaissance faciale d’une efficacité redoutable. Cet outil est capable de réaliser un modèle précis en trois dimensions d’un visage après avoir analysé une photo postée sur le réseau social. Un exemple de biométrie appliquée aux réseaux sociaux.
zuckerberg

Un nouvel outil de reconnaissance faciale
Imaginez-vous dans la rue, en train de rentrer chez vous après une dure journée de travail. Quelqu’un vous arrête soudainement et vous salue, très enthousiaste de vous voir. Il vous demande même de vos nouvelles et semble en connaître beaucoup sur vous. Ce n’est malheureusement pas réciproque. Vous vous concentrez de toutes vos forces pour essayer de vous souvenir de ce visage, pourtant familier, en vain.
Cette situation désagréable est arrivée à tout le monde au moins une fois dans sa vie, mais ne risque pas de concerner Facebook dans un avenir très proche.
En effet, la firme de Zuckerberg a présenté il y a plusieurs mois un outil révolutionnaire de reconnaissance faciale.
facial recognition
Dénommé DeepFace, cet outil est capable d’analyser une photo d’un visage humain en deux dimensions de manière très précise. Les informations collectées, qui sont effectivement de nature biométrique, permettent ensuite au programme de réaliser parfaitement une maquette en trois dimensions du visage.
Trouver un visage similaire dans la gigantesque collection d’images de Facebook, hautement fournie en faciès humains, est alors un jeu d’enfant pour DeepFace.
Reprenant le modèle tridimensionnel généré dans le premier temps, le programme outrepasse l’angle de vue de l’image-modèle originale et peut de cette manière aisément reconnaître un même visage sous toutes ses coutures.
Toujours est-il que le fonctionnement de DeepFace ne se limite pas à cette prouesse technique, dans la mesure où il est également intelligent. En effet, le programme utilise la technologie « Deep Learning », qui implique la simulation informatique de réseaux neuronaux capables de reconnaitre des visages similaires parmi un volume impressionnant de données.
Une intégration prochaine dans le réseau social
Pour l’heure, DeepFace n’est pas encore opérationnel. Développé par les ingénieurs de Facebook et un professeur de l’Université de Tel Aviv, le projet a néanmoins suscité l’intérêt de Marc Zuckerberg, le PDG de Facebook. Ce dernier, très enclin à utiliser largement les nouvelles formes d’intelligence artificielle pour améliorer les performances de Facebook, a surement dû être impressionné par les résultats expérimentaux de DeepFace.
En effet, le taux de succès obtenu pour la reconnaissance d’une personne sur plusieurs photos la représentant sous plusieurs angles a été de 97,25% contre 97,53% pour le cerveau humain.
La performance accomplie est donc très largement supérieure à l’algorithme actuel utilisé sur le réseau social. Ce dernier, pourtant complexe, ne se contente que de mesurer certains traits morphologiques du visage (tels que la distance entre les yeux, le nez et la bouche, etc.). En outre, il ne fonctionne de manière optimale que sur un visage de face et sous des conditions d’éclairage favorables.
Il n’en reste pas moins qu’il est parfois troublant de remarquer la précision avec laquelle Facebook propose des possibilités d’identification sur les images fraichement uploadées. Les suggestions de personnes s’avèrent en effet bien souvent exactes.
Si pour l’instant rien n’est encore officiel, DeepFace se pose comme l’avant-garde de la technologie prochainement utilisée par Facebook, en addition avec des méthodes d’analyse du comportement des utilisateurs et du contenu qu’ils postent, tels que leurs statuts.
Au vu du gain d’efficacité que promet DeepFace, il y a fort à parier que la firme est pleinement consciente de l’intérêt qu’elle pourrait trouver à doter son réseau social de tels moyens qui le projetteraient dans le Web sémantique.
Une technologie trop intrusive ?
Si la prouesse technique que constitue DeepFace suscite de l’admiration, il est difficile d’en dire autant des personnes soucieuses pour leur vie privée.
En effet, avec près de 1,35 milliard d’utilisateurs actifs par mois, DeepFace serait potentiellement capable de reconnaitre plus d’un septième de la population mondiale.
cnil
 
En France, la CNIL a mis en ligne une fiche pratique sur la biométrie, indiquant que ces technologies peuvent constituer un moyen de traçage des personnes. En effet, les caractéristiques physiques d’un individu sont permanentes et innées (sauf cas exceptionnel), ce qui fait que la donnée biométrique se distingue en ceci des autres données personnelles.
Elle rappelle par conséquent que la Loi informatique et libertés du 6 janvier 1978 impose à toute personne collectant des données personnelles de se soumettre à un régime d’autorisation, ainsi qu’à une obligation d’information de la personne concernée.
La CNIL observe également que d’après une étude du CREDOC, les français sont assez frileux quant à l’utilisation des données biométriques dans leur vie quotidienne à l’horizon 2020.
DeepFace pose aussi des questions à propos de la réalité augmentée, soulevées notamment par les Google Glass (qui viennent toutefois d’être retirées de la vente).
A titre d’exemple, et pour reprendre l’anecdote d’introduction, imaginons maintenant que vous vous promeniez dans la rue et que vous croisiez cette personne familière mais inconnue.
DeepFace serait en mesure de l’analyser en temps réel et de mettre un nom sur sa tête à votre place. Mais vous seriez alors loin d’être seul(e) à bénéficier de cette très commode assistance…
 

Nicolas Babelon
Étudiant du Master 2 Droit et Gestion de l’économie numérique de l’Université de Strasbourg, je tâche de prendre la mesure d’un monde transformé par la grande révolution technologique que sont les TIC. Nouvelles techniques, nouveaux modèles économiques, nouveaux enjeux politiques et stratégiques, le numérique est en passe de devenir la locomotive à laquelle s’accrocheront les wagons de notre société contemporaine…
 LinkedIn couleur 

 

A propos de Nicolas BABELON