Bitcoin, Ether, Litecoin, Bitcoin Cash, Iota, Ripple, Monero … les crypto-monnaies connaissent un succès croissant. Leur extrême volatilité permet aux traders avertis de multiplier les gains sur des périodes de temps très courtes. Contrairement à une idée largement répandue, les plus-values obtenues grâce aux crypto-devises ne sont pas à l’abri de toute taxation. Bien au contraire, les gains, qu’ils soient occasionnels ou obtenus au titre d’une activité habituelle, peuvent être soumis à l’impôt. Une décision du Conseil d’Etat en date du 26 avril 2018 est venue clarifier la situation pour les contribuables français en ce qui concerne le Bitcoin. Cette décision est directement applicable à toutes les crypto-monnaies.
Les gains occasionnels liées aux crypto-monnaies sont des plus-values de biens mobiliers
Dans sa décision du 26 avril dernier, la plus haute juridiction administrative a estimé que les unités de Bitcoin relevaient de la catégorie des biens meubles incorporels et que dès lors les profits tirés de leur cession devaient être imposés, par principe, comme des plus-values de cession de biens mobiliers.
Initialement imposables à l’impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices non commerciaux (BNC), seuls les revendeurs occasionnels se voient désormais appliquer le régime des plus-values de cession mobilière. En effet, les traders qui revendent à titre habituel leurs crypto-monnaies restent imposés, comme des professionnels, à l’impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux (BIC).
Par ailleurs, seules les cessions occasionnelles d’une valeur supérieure à 5 000 euros (et non les plus-values supérieures à 5000 euros) sont soumises à l’impôt sur les plus-values. Ainsi les petits crypto actifs échappent à toute imposition!
En ce qui concerne l’activité de “minage”, opération qui consiste à valider une transaction et à l’enregistrer dans la blockchain par le biais de calculs algorithmiques contre une rémunération en crypto-monnaie, le caractère habituel ou non n’a pas d’importance. Les revenus en bitcoin obtenus par les “mineurs” sont taxés à l’impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices non commerciaux (BNC), et ce, en toute occurence.
Un nouveau régime globalement favorable aux utilisateurs
Les plus-values mobilières sont imposées au taux forfaitaire de 19 % auquel viennent s’ajouter les prélèvements sociaux à hauteur de 15,5 % pour les revenus 2017 et de 17, 2 % pour les revenus 2018. Soit une imposition globale de :
34,5 % pour les revenus de 2017
36,2 % pour les revenus de 2018
Le taux d’imposition global est ainsi plus conforme à ce qui se fait dans les autres pays d’économie libérale même s’il reste nettement plus élevé qu’en Allemagne ou en Suisse par exemple.
L’application de ce régime est globalement favorable au contribuable utilisateur de crypto-monnaies. Avec la fiscalité précédente, le taux d’imposition pouvait en effet atteindre jusqu’à 67 % pour la tranche la plus élevée. Globalement seulement puisque les contribuables dont la tranche marginale d’imposition est inférieure à 19% subiront une hausse d’impôt.
Vers une imposition du simple échange de crypto-monnaie?
La taxation de l’échange de crypto-monnaie peut paraître surprenante puisqu’elle implique qu’un contribuable qui souhaiterait, par exemple, échanger des bitcoins contre des Ether soit imposable alors même qu’il n’aurait pas récupéré de cash dans l’opération.
En disposant que sont imposables (BIC) “les gains provenant de la cession, à titre habituel, d’unités de ” bitcoin ” acquises en vue de leur revente, y compris lorsque la cession prend la forme d’un échange contre un autre bien meuble”, le Conseil d’Etat semble pourtant ouvrir la porte à une telle imposition.
Si cette décision venait à être confirmée, elle conduirait à des situations ubuesques pour les contribuables concernés. L’extrême volatilité des crypto-monnaies pourrait conduire à ce qu’un contribuable soit contraint par un impôt important au titre d’une année fiscale et qu’il soit dans l’incapacité de s’en acquitter le moment venu du fait d’une baisse du cours.
En effet, lorsque le contribuable vend ses crypto-monnaies contre de l’argent réel, il reçoit leur valeur en cash. Une partie de la somme récoltée peut servir au paiement de l’impôt. En revanche, lorsqu’il l’échange contre une autre crypto-devise, il ne reçoit pas de cash. Il n’obtiendra d’argent réel que lors de la revente. Or si le cours a lourdement chuté, le contribuable sera très largement perdant, voire dans une situation d’endettement si l’impôt est plus élevé que la plus-value obtenue.
Actuellement applicable, il n’est pas impossible qu’une loi vienne amender la décision du Conseil d’Etat. Si l’on se fie aux dernières déclarations du ministre de l’économie Bruno Le Maire, Il semble exister une volonté du gouvernement de faire de la France une place forte du trading de crypto-monnaies. Sur cette base, on peut légitimement s’attendre à ce qu’une fiscalité simplifiée et allégée des crypto-monnaies soit intégrée dans la Loi. Peut-être l’application de la Flat Tax dès 2019. Quoiqu’il en soit, il existe des motifs d’espoir pour les adeptes de crypto-monnaies.