Qui n’a jamais été dérangé lors d’une navigation sur le web par l’apparition d’une publicité ? C’est pourtant grâce à elle que les sites en ligne se financent et peuvent proposer un accès gratuit aux internautes. Ainsi en mettant sous silence l’apparition de publicités, les adblockers remettent aujourd’hui en cause le modèle économique des sites et posent un défi existentiel à Internet.
ad blocker growth
Un important manque à gagner pour les annonceurs
Alors qu’il y a quelques années l’impact des adblockers sur la rentabilité des sites était mineur, il n’est désormais plus à négliger.
D’après une étude menée par Adobe et Page Fair, start up qui propose des solutions de contournement aux logiciels de blocage, on estime aujourd’hui que près de 200 millions d’internautes dans le monde utilisent un logiciel de blocage de publicités.
La principale conséquence de la popularité de ces bloqueurs de publicité est un manque à gagner de plus en plus important pour les sites. L’étude rapporte que pour l’année 2015 près de 22 milliards de dollars de manque à gagner de recettes publicitaires sont imputables à ces ad blockers. Ce chiffre devrait sans doute doubler d’ici la fin de l’année 2016.
En ce qui concerne le taux de pénétration et l’utilisation de ces adblocks, on constate aujourd’hui que les pays où les internautes y ont le plus recours sont la France et l’Allemagne avec respectivement 27% et 24% d’utilisation. Cela est plus négligeable dans les pays anglo-saxons avec un taux d’utilisation de près de 10% aux Etats-Unis et au Royaume-Uni.
 
Une innovation propre aux nouvelles technologies
La publicité est aujourd’hui la principale source de revenus des sites internet qui reposent sur le principe de la gratuité. Ainsi, 90% du chiffre d’affaires de Google proviendrait de cette publicité numérique. Elle représente donc une portion importante de l’économie digitale : pour le 1er semestre 2014, on enregistre un chiffre d’affaires mondial de près de 750 milliards.
Contrairement aux journaux et à la télévision, avec les nouvelles technologies de l’Internet, il est désormais aisé de passer outre l’affichage intempestif de publicités et conserver la gratuité de navigation.
Ces logiciels de blocages peuvent ainsi bloquer jusqu’à 40% des bannières publicitaires et pop-ups pour améliorer le confort de navigation de l’internaute.
Disponible sur Google Chrome, Safari et Mozilla Firefox, Adblock est aujourd’hui l’application de blocage de publicités la plus téléchargée au monde avec ses 200 millions d’utilisateurs.
A l’heure actuelle, la majorité des sites web ont choisi le modèle de la gratuité et ne tirent leurs revenus que grâce aux publicités. L’installation de ces adblockers pose donc un réel défi pour l’avenir de ces sites qui ne tirent peu ou plus de revenus pour payer tout ce qui à trait à l’alimentation de contenu en ligne.
Un compromis à trouver entre les sites et leurs utilisateurs
La situation ne va pas en s’améliorant, car désormais la tendance, bien que faiblement importante pour le moment, se propage aux appareils mobiles. A l’heure actuelle disponible sur les produits Android, on peut s’attendre à une accélération du phénomène lorsque le blocage sera permis sous iOS.
Il faut donc parvenir à un compromis pour contenter à la fois les sites et leurs utilisateurs : c’est à dire un compromis qui maintienne la gratuité de l’accès aux sites et l’existence de revenus publicitaires pour les éditeurs et annonceurs. Pour les sites, on peut imaginer des publicités moins présentes et moins intrusives comme le préconise Sridhar Ramaswamy, vice président senior en charge de la publicité chez Google. Face à ces « mauvaises publicités », ce dernier appelle à la création de « standards durables » avec des publicités qui ne gênent pas la navigation des internautes.
Pour plus de tolérance des utilisateurs envers les sites qui offrent gratuitement de l’information, il faudrait sans doute les sensibiliser à l’importance de la publicité pour la pérennité de l’Internet gratuit.
En réponse à l’émergence des adblocks, certains sites se sont aussi organisés et ont mis en place des technologies qui permettent de détecter si un plug-in est installé sur le navigateur de l’internaute et l’obligent ainsi à le désactiver pour pouvoir consulter la page.
Certains comme l’éditeur allemand Axel Springer du journal BILD va même imposer aux utilisateurs de souscrire à un abonnement payant si le logiciel de blocage n’est pas désactivé lors de la navigation sur leur site en ligne.
Si, à l’avenir, les revenus publicitaires s’avèrent trop minces pour les sites, on peut redouter qu’ils changent leur modèle économique en proposant de recourir à des services payants pour naviguer, ce qui on l’imagine, ne devrait pas enchanter l’internaute confortablement habitué à la gratuité d’Internet..
 
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Mehdi Taieb,

Etudiant en master 2 Droit de l’économie numérique à l’Université de Strasbourg

A propos de Mehdi Taieb

Cet article a 2 commentaires

  1. Nicolas Chevallier

    On voit aujourd’hui de plus en plus de “native advertising”, un joli terme pour designer les publi reportages… Le Saint Graal semble-t-il face aux adblockers.
    Ce qui me gène le plus avec certains adblockers, c’est qu’il ne bloque pas uniquement les publicités mais aussi le tracking, y compris Google Analytics (ublock de mémoire).

  2. Jean-Louis

    A mon avis, les adblocks ne représentent pas une menace. En effet, les sites devront juste penser à mettre en place une stratégie beaucoup plus subtile et qui ne dérange pas la navigation des internautes.

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