L’intérieur d’une Mercedes-Benz SLS AMG 2012                                                                                                                                                                Source Photo : Ivaylo Sotirov

Les constructeurs automobiles payent trop cher pour des fonctionnalités embarquées, que les consommateurs méconnaissent. Dans les cas où les usagers veulent de telles technologies dans leur véhicule, ils préfèrent des solutions moins chères, livrées par des tiers.
 
En examinant trois recherches, faites en 2014 et 2015 par McKinsey & Company, PwC’s Strategy& et J.D. Power, nous pouvons constater quelques faits quant aux voitures connectées qui ne sont pas du tout en faveur de la construction automobile.
Le rapport de J.D, Power concerne les 90 premiers jours d’utilisation. Appelé ‘’Driver Interactive Vehicle Experience Report’’, il a été conçu après une recherche qui a été faite entre avril et juin 2015 avec la participation de 4200 propriétaires de voitures. Le rapport mesure 33 fonctionnalités hi-tech.
Tout d’abord, il devient clair qu’au moins 20% des personnes qui ont acheté une nouvelle voiture, n’ont jamais utilisé 16 parmi les 33 gadgets et options qui étaient installées dans la voiture et font l’objet de la recherche. Cette affirmation est valable pour une période de trois mois après l’achat du véhicule. On considère cette période comme la plus importante car chaque utilisateur doit pouvoir se servir ou bien connaitre tous les gadgets installés. Dans le cas contraire, les producteurs doivent revoir la fonctionnalité et la proposer uniquement comme une option supplémentaire. Les vendeurs d’automobiles doivent aussi connaitre ces fonctionnalités pour expliquer leur utilité aux consommateurs. Cela sera possible si les constructeurs les conçoivent suffisamment intuitives et les expliquent aussi, de leur côté, aux vendeurs.
Parmi les éléments que l’on méconnait on retrouve notamment les options de réservation des tickets ou des chambres dans un hôtel, des informations sur des restaurants et des stations services sur la route, les possibilités d’utiliser des wifi spots publics. Une autre option ignorée, qui est même clairement présentée dans les campagnes publicitaires des constructeurs, est le système de stationnement automatique. Il y a 35% des usagers qui n’utilisent pas ce service. Le concierge à bord du véhicule n’inspire pas 43% des usagers, alors que 32% ne se servent pas des applications préinstallées.
De l’autre côté, il y a des options que les consommateurs connaissent et ne veulent surtout pas dans leur véhicule. Au moins 20% de tous les consommateurs interviewés ne veulent pas 14 sur les 33 options. Les moins populaires sont Apple CarPlay et Google Android Auto, le concierge à bord. Les représentants de la génération Y ne sont pas du tout intéressés par 23 sur les 33 fonctionnalités examinées. Parmi elles, on retrouve les options d’infotainment et de connectivité.
Les experts de J.D. Power en concluent que les consommateurs payent beaucoup plus pour des options hi-tech, qu’ils n’utilisent pas à la fin. Une grande partie des chauffeurs, surtout ceux qui ont entre 21 et 38 ans, compte beaucoup plus sur les solutions fournis par des tiers sur leur smartphones ou tablettes. Cela est surtout dû aux habitudes des consommateurs et à la qualité de ces services.
Néanmoins, tous ceux qui connaissent les options, aimeraient bien avoir un système anticollision, le système de stationnement automatique, le système de surveillance d’angle mort et autres, qui concernent la sécurité et la maintenance dans leur véhicule. Cela s’explique par le fait qu’il n’y a pas de solutions offertes par des tiers et c’est une fonctionnalité embarquée.
La recherche faite par Strategy& de PwC rajoute encore des détails, qui expliquent le comportement des acteurs. Les consommateurs de la classe moyenne sont peu disposés à payer pour des fonctionnalités hi-tech, malgré le fait qu’ils aimeraient bien les avoir dans leurs véhicules. Cela explique le fait que la majorité des consommateurs préfèrent, et par la suite utilisent, des solutions alternatives. Certains producteurs sont déjà conscients de ce fait. Par exemple, VW est en train d’expérimenter en proposant des packs différents à tous ses consommateurs. Il est très probable que ces efforts n’auront presque aucun effet. La simple comparaison des services de navigation est un très bon exemple. Un système de navigation de TomTom coute environ 180 €, alors que le système de navigation embarquée, acheté en option, coûte autour de 600 €.
En examinant le segment des voitures luxueuses, il devient clair que les constructeurs sont en train de gaspiller de l’argent juste pour monter des options hi-tech en plus dans les voitures proposées. Cette démarche est vue comme nécessaire pour rester compétitif. De plus, toujours dans cette optique de rester compétitives, les entreprises ne peuvent pas augmenter trop les prix. La E-Classe de Mercedes-Benz de 2015 coute 1654€ de plus que le modèle de 2010, malgré le fait que Daimler ait investi plus de 7000€ en options hi-tech par véhicule. Les fonctionnalités, qui permettent une voiture plus connectée, coutent plus de 6000€ par véhicule à BMW. On retrouve parmi ces options le concierge à bord et les informations sur la circulation en temps réel dans le système de navigation. La situation chez d’autres concurrents comme Audi et Lexus est à peu près la même. A cause de la compétition assez forte, les prix stagnent autour de 60000 – 70000 €. En moyenne, le prix de l’E-Classe, déjà mentionnée, a augmenté uniquement de 4%. Il est prévu que cette tendance continue.
On constate bien que les constructeurs investissent dans des solutions qui ne sont pas désirées par les consommateurs  ou bien sont considérées comme trop chères comparées aux solutions alternatives. Il y a des grandes différences entre l’importance d’une solution pour le consommateur et la volonté de payer pour lui. Les systèmes d’infotainment, que l’on considère comme les premiers éléments de la voiture connectée qui vont ‘’envahir’’  les véhicules, sont intéressants, mais uniquement la moitié des consommateurs auront la bonne volonté de payer pour une telle option. La situation se détériore nettement quand nous comparons les facteurs d’importance et de volonté de payer quant aux systèmes de diagnostique et la possibilité de connecter le véhicule avec l’Internet.
De l’autre côté, les investissements dans de tels gadgets sont vus par les constructeurs comme absolument nécessaires pour rester compétitif, alors que les prix stagnent et les profits n’augmentent pas suffisamment vite. Donc, les tendances ont très peu changé entre 2014 et 2015.
La recherche, faite par McKinsey&Company en 2014 est la preuve de cette affirmation. L’organisation avait interviewé 2000 propriétaires des nouveaux véhicules d’Allemagne, du Brésil, de la Chine et des Etats-Unis. La connectivité est importante, mais, pour pouvoir proposer des voitures vraiment connectées, il faut s’assurer que les données sont protégées. Et c’est encore un clou dans le cercueil des producteurs. Investir dans des technologies, qui non seulement embrouillent, mais font peur aux consommateurs est déjà trop risqué en court et en moyen terme.
La recherche démontre qu’uniquement 13 % des consommateurs achèteront une voiture s’il n’est pas possible de la connecter avec l’Internet. La connectivité est même plus importante que des éléments classiques comme la consommation de carburant et la puissance du moteur pour 25% des utilisateurs. Par contre, plus de 37% des interviewés n’achèteront pas un véhicule connecté à cause des craintes, liées à l’utilisation des données privées. Ces craintes sont les plus importantes chez les consommateurs allemands et américains. En moyenne, 54% des personnes enquêtées ont peur d’acheter une voiture connectée à cause de la possibilité qu’elle soit piratée. Comme nous l’avons déjà présenté dans notre blog, c’est totalement possible. Plus de la moitié de ces 2000 propriétaires questionnés, qui ont ce type de craintes, habitent en Allemagne, en Chine et au Brésil.
Le rapport constate des tendances, qui se poursuivent en 2015. Les consommateurs veulent des voitures connectées, mais avec des fonctionnalités peu chères et aussi sécurisées.
Il est judicieux de dire que des années difficiles attendent les constructeurs automobiles, malgré les prévisions d’un marché en expansion. Il sera très difficile de convaincre le consommateur que le produit et les services associés sont à un prix juste, sont utiles pour lui. Et sont surtout sûrs quand il s’agit de la vie des personnes. Du coup, la situation actuelle coûte trop cher à tous les acteurs. L’amélioration se cache peut-être derrière une focalisation des constructeurs sur les options, qui ne relèvent qu’à la voiture et à son fonctionnement pour proposer un pack – le produit et services rattachés. Toutes les autres fonctionnalités peuvent être offertes comme option payante et développées avec la participation des entreprises NTIC. Ceci suppose aussi une restructuration des entreprises de la construction automobile.

A propos de Konstantin Kostov