En 2008, Guillaume Passaglia et Maxime Valette ont créé le site viedemerde.com
Ce site a vocation à recueillir des anecdotes de la vie quotidienne et à les raconter sous forme humoristique. Le concept a séduit de nombreux internautes, et plus de deux milles histoires sont désormais postés sur ce site quotidiennement.
Comme sur Twitter, le nombre de signe est limité, les histoires ne doivent pas dépasser 300 caractères. Les anecdotes commencent toutes par « Aujourd’hui » et se finissent immanquablement par « VDM », pour Vie De Merde.
Aujourd’hui, mon mari m’a demandé de cuisiner un repas bien riche et bien gras car il a hâte d’essayer la nouvelle brosse WC qu’il vient d’acheter. VDM
Exemple d’histoire posté sur le site viedemerde.fr
Depuis, le concept s’est décliné en produits dérivés, dont des livres ou des agendas.
Le problème survient en 2012, lorsque les fondateurs constatent une ressemblance importante entre deux films publicitaires et des anecdotes publiées sur leur site : lien d’une des vidéos incriminée
Les deux publicités reprennent clairement la structure des anecdotes du site, bien que les histoires ne soient pas tout à fait identiques.
La société éditrice du site viedemerde.fr demande alors la cessation des diffusions de ces spots. Face à un refus, viedemerde.fr assigne le concepteur devant le tribunal de grande instance de Paris et demande l’interdiction des publicités, au motif que viedemerde.fr est une œuvre collective et qu’il y a contrefaçon. Le site demande également 137.000€ au titre du préjudice patrimonial et du préjudice moral auxquelles s’ajoutent 100.000€ pour parasitisme.
Il faut savoir que le droit Français distingue plusieurs types d’œuvres. Il existe notamment :

  •  l’’œuvre individuelle, créée par une personne physique unique et qui appartient à cette personne
  • l’œuvre dérivée (ou œuvre composite), qui est l’œuvre tirée d’une œuvre antérieure ce qui comprend les adaptations, les traductions, les adaptations musicales, les arrangements, les orchestrations
  • l’œuvre de collaboration est une œuvre créée par plusieurs personnes physiques, appelées coauteurs
  • l’œuvre collective, créée par plusieurs personnes sous la responsabilité d’une personne physique ou d’une personne morale, et dans laquelle la participation de chacun est indivisible de l’œuvre elle-même

Finalement, le tribunal considérera qu’il n’y a pas œuvre collective en se basant sur l’articleL113-2 du code de la propriété intellectuelle :
Est dite collective l’œuvre créée à l’initiative d’une personne physique ou morale qui l’édite, la publie et la divulgue sous sa direction et son nom et dans laquelle la contribution personnelle des divers auteurs participant à son élaboration se fond dans l’ensemble en vue duquel elle est conçue, sans qu’il soit possible d’attribuer à chacun d’eux un droit distinct sur l’ensemble réalisé.”
Or, les juges estiment que deux conditions ne sont pas remplies: la publication ne se fait pas sous le nom des détenteurs du site et surtout, les contributions personnelles « ne se fondent pas dans l’ensemble » puisque les pseudos des auteurs restent visibles.
Il n’y a donc pas contrefaçon, d’autant plus que la cour ne retient pas non plus le critère de l’originalité.
Le tribunal retiendra toutefois le parasitisme puisque la forme a été copiée, et accordera 5.000€ aux demandeurs.
 
Adrien Laurent

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