Dans une première partie, le behavioural pricing 2.0 était présenté comme une pratique marketing de différenciation des prix en ligne qui représentait un enjeu économique d’avenir pour les web-marchands. La protection des données personnelles demeure néanmoins indispensable. Pour le consommateur d’une part et pour l’entreprise d’autre part tant l’analyse et le traitement de ces données peuvent constituer un argument économique ainsi qu’un outil concurrentiel non négligeable.
Web 2.0 Digitage 2012

La question des données à caractère personnel : des Big au Little data comportementales

Comme a pu l’expliquer Mme la professeure Laure Marino dans son article « Notre vie privée : des Little data aux Big data », l’enjeu de la vie privée est désormais économique. De ce fait, les Big data prennent place au cœur du behavioural pricing 2.0 tant la masse volumineuse de données collectées sur la toile permet un ciblage d’une précision jamais égalée. Ce marketing dit « programmatique » permet de diffuser aux e-consommateurs des offres et des messages pertinents en temps réel en fonction de leur comportement en ligne. Aussi excitant que cela puisse être pour les web marchands, cela soulève un certain nombre de questions techniques et juridiques.
D’un point de vue juridique, si l’on se place du côté de l’entreprise, il peut s’agir de la protection de la base de données selon la loi du 1er juillet 1998 conférant un droit d’auteur sui generis au producteur de la base de données permettant à ce dernier de s’opposer à toute extraction ou réutilisation d’une partie substantielle du contenu de cette base et protéger de ce fait son patrimoine informationnel. Le producteur de la base de donnée devra donc faire en sorte de masquer au mieux les données collectées et privilégier la sécurité de la base.
Mais si l’on se place du côté du consommateur, c’est bien des limites posées par la nature des données qu’il s’agit. Le terrain de jeu des Big data n’est pas sans limites et ces dernières tiennent à la nature des données et aux traitements envisagés dans l’analyse nécessaire au behavioural pricing. En effet, une large partie des Big data sont composées de données à caractère personnel. Du fait de sa valeur, des volumes de données collectées, de leurs variétés et de la vélocité, l’enjeu pour les entreprises utilisant le Big data est important. Avant de pouvoir profiter d’une telle mine d’or, les entreprises françaises, qui ont un rôle indéniable à jouer, doivent et devront se conformer à la directive européenne 95/46/CE sur la protection des données personnelles.
Les entreprises responsables de traitement souhaitant valoriser elles-mêmes leurs données, ce qui apparaît essentiel aujourd’hui, devront définir parfaitement la finalité de leur projet Big data pour la collecte des données personnelles nécessaires au behavioural pricing. Cela passe notamment par la pertinence du choix des données ainsi qu’une durée de conservation déterminée afin que cette pratique ne constitue pas une ingérence caractérisée dans le droit fondamental des citoyens au respect de la vie privée. Le point le plus difficile à respecter semble être la loyauté du traitement qui reviendrait à obtenir le consentement de chaque consommateur.
Néanmoins, ce qui peut apparaître comme une contrainte au premier abord pour les entreprises n’est en réalité qu’une étape nécessaire à la pleine exploitation de ces données dans la transparence et le respect des consommateurs.
 

La protection des données personnelles comme argument économique et outil concurrentiel ?

Les e-citoyens prêtent de plus en plus attention à leurs données personnelles et à l’exploitation qui peut en être faite. Ainsi, la défense des libertés fondamentales de chaque individu sur Internet représente aujourd’hui un sujet de société, d’inquiétude, de paranoïa parfois, de telle sorte que l’on peut considérer la protection des données personnelles comme une composante essentielle de l’économie numérique au point de devenir un argument économique majeur. On comprend assez aisément l’enjeu économique de fournir un cadre juridique efficace afin d’apporter une certaine confiance dans l’économie.
D’un autre côté, ce cadre doit également permettre une libre circulation contrôlée et donner une importance particulière à la sécurisation des données utilisées. A l’heure de la révision de la directive de 1995, la modernisation du cadre juridique se doit d’être en phase avec les nouvelles réalités du web. La protection des données s’apparentant à un véritable outil de concurrence, certains souhaitent un cadre normatif le plus lâche possible afin de faire face à la forte concurrence des USA et de l’Asie. Au contraire, encadrer de manière stricte –mais non restrictive- la protection des données personnelles tout en délimitant un climat favorable à l’exploitation des données collectées et traitées donnerait une valeur ajoutée aux entreprises européennes.
Une chose est sûre, la fin du static pricing est annoncée laissant la bienvenue au dynamic pricing par le behavioural pricing 2.0 aux vues de l’évolution exponentielle des techniques mercatiques dans l’économie numérique. Une nouvelle fois, il ne s’agit pas de déterminer si une telle technique est actuellement utilisée mais d’avoir à l’esprit qu’elle va irrémédiablement se démocratiser et faire des e-citoyens des consommateurs éclairés à l’heure du tout numérique.
 
11Ludovic POIDEVIN
Étudiant en Droit de l’économie numérique passionné par le Droit de la propriété intellectuelle, la protection des données personnelles et les nouvelles technologies.
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A propos de Ludovic Poidevin