S’il est un sujet qui fait grand débat actuellement sur le secteur du numérique, c’est bien la neutralité de l’Internet. Cette question n’est pourtant pas nouvelle ; dans le débat engagé autour du sujet, il ne s’agit pas de revenir sur le serment de l’agent de poste de « ne jamais chercher à connaître le contenu du courrier », ou encore aux pratiques de certains régimes dits autoritaires, où les lettres étaient interceptées, et soigneusement refermées après violation du contenu.
Contrairement à la poste qui différentie ses prestations et ses tarifs en fonction du poids ou de la nature du colis, le principe de neutralité de l’Internet veut entre autre qu’il y ait de la transparence sur la gestion des réseaux et que soit interdit tout blocage de contenus, applications, services et terminaux légaux. A ce niveau, on assiste à une divergence de points de vue entre les Fournisseurs d’Accès Internet (FAI) et les grands consommateurs de bande passante réseau tels que Google, Apple et bien d’autres.
Les Fournisseurs d’accès se plaignent qu’ils investissent de fortes sommes d’argent pour la construction de réseaux ; à ce titre, ils souhaiteraient une contribution des pourvoyeurs de service à l’instar de Google, pour un partage de charges.
Cette divergence de vues, qui a vite fait de dégénérer en une tension n’a pas pu trouver de compromis ; ce qui a entraîné l’Opérateur Free à bloquer pendant quelques heures, des publicités pour ses abonnés. Ce blocage qui à première vue semblait pénaliser l’opérateur Google a plutôt eu des répercutions négatives chez nombres des propriétaires de sites web nationaux, qui tirent l’essentiel de leur ressources sur la publicité.
Bien qu’il n’existe pour l’heure aucun fondement juridique empêchant Free à opérer des restrictions de type publicité sur son réseau, sa démarche engage la liberté individuelle des consommateurs, tant il est  vrai de façon éthique qu’aucun FAI n’a le droit de décider à la place des citoyens ce à quoi ils ont ou non accès sur Internet.
Par ailleurs détenteur de licences de téléphonie accordées par la puissance publique, il ne peut unilatéralement décider de porter atteinte à la neutralité du fonctionnement des infrastructures numériques. Sinon ce serait accepter la privatisation d’un bien public, le libre droit d’accès aux informations et aux services sur Internet.
Dans le cas où rien n’est fait dans les jours à venir par le législateur, ce sera désormais la porte ouverte à des censures éditoriales, commerciales, économiques, politiques, idéologiques, communautaires, nationales, religieuses, etc., livrées au seul bon vouloir du fournisseur d’accès. Ce sera en fin de compte le cœur même de la liberté qui sera mis en mal.
Un journaliste lors d’un débat télévisé a déclaré : « le filtrage du net est aujourd’hui l’apanage de “grandes démocraties” comme la Chine ou la Corée du Nord » ; Free a donc le mérite aujourd’hui d’avoir donné un très mauvais signal en débordant largement de ses missions de FAI. Il montre aussi à nos gouvernants, surtout aux régimes autoritaires que le filtrage à la source du web est techniquement possible et facile à mettre en œuvre.