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Des sociétés comme LOUIS VUITTON, CHRISTIAN DIOR ou LVMH font la traque sur internet aux vendeurs de contrefaçons. Stratégiquement, il est beaucoup plus intéressant d’attaquer eBay plutôt que des contrefacteurs plus ou moins identifiables. Trois arrêts de la Cour de cassation du 3 mai 2012 concernant ces sociétés rendent pleinement responsable eBay. Cette solution n’est évidemment pas seulement applicable au monde du luxe.

Éditeur ou hébergeur ? Une question vieille comme l’internet :
Il est reproché à eBay de ne pas assurer la légalité des offres commerciales faites à partir de sa plateforme. Concrètement, la plateforme est poursuivie pour avoir favorisé des actes de contrefaçon.
La solution dépend du statut juridique d’eBay. Si eBay est un éditeur de contenus, cette société s’expose à une responsabilité de droit commun. Elle sera donc très facilement tenue pour responsable. Si eBay est un simple hébergeur, cette société peut profiter d’une sorte de « filtre à responsabilité » qu’offre ce statut. Dans ce dernier cas, eBay n’est responsable qu’à compter de sa connaissance précise de l’acte illégal. (cf. article 6.1.2 de la loi du 21 juin 2004 et l’article 14 §1 de la directive 2000/31.)
C’est d’ailleurs une des questions les plus fréquentes qui se pose concernant le droit de l’internet et spécialement pour eBay. En simplifiant, la clef de répartition entre les deux statuts est la suivante : un hébergeur est « neutre » vis-à-vis des contenus communiqués alors qu’un éditeur a un « rôle actif » vis-à-vis de ces mêmes contenus. Cette analyse doit cependant être adaptée à eBay qui n’est pas un éditeur ou un hébergeur comme les autres.
Le constat du rôle actif d’eBay vis-à-vis des offres commerciales :
L’arrêt relève qu’eBay fournit à l’ensemble des vendeurs des informations pour leur permettre d’optimiser leurs ventes. De plus, eBay assiste les vendeurs dans la définition et la description des objets mis en vente. Il s’agit par exemple de proposer un espace personnalisé de mise en vente ou de bénéficier « d’assistants vendeurs ». EBay envoie des messages spontanés à l’attention des acheteurs pour les inciter à acheter.
Plus étonnant, l’enchérisseur qui n’a pu remporter une enchère est invité à se reporter sur d’autres objets similaires. En cas de contrefaçon, cette dernière fonction peut être particulièrement dangereuse… Dès lors, eBay ne peut s’abriter derrière le statut d’hébergeur. Étant « actif » vis-à-vis des contenus de sa plateforme, il en devient responsable.
La question de la compétence des juridictions françaises
Pour la Cour de cassation, les tribunaux français étaient compétents vis-à-vis du site eBay.co.uk. En effet, la Cour d’appel a bien fait ressortir que le site s’adressait directement aux internautes français. Dès lors, les juridictions françaises étaient compétentes.
Par contre, la justification de la compétence pour le site eBay.com n’est pas satisfaisante pour la Cour de cassation. La Cour d’appel avait relevé la simple accessibilité des contenus à partir du territoire français. Pour la Cour de cassation, il convient de démontrer une véritable volonté de s’adresser aux acheteurs français pour obtenir une compétence française.

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