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  • Post category:Droit des TIC / E-commerce

En matière de vente sur internet entre un professionnel et un consommateur*  des incertitudes ont longtemps demeurés quand au tribunal compétent lorsque le consommateur et le professionnel ne sont pas domicilié dans le même état membre.

*Au sens du droit européen un consommateur est une personne qui conclut un contrat pour un usage étranger à son activité professionnelle
L’article 15 1. c) du règlement 44/2001*, précise que le tribunal compétent est celui ou réside le consommateur :  « lorsque, dans tous les autres cas, le contrat a été conclu avec une personne qui exerce des activités commerciales ou professionnelles dans l’État membre sur le territoire duquel le consommateur a son domicile ou qui, par tout moyen, dirige ces activités vers cet État membre ou vers plusieurs États, dont cet État membre, et que le contrat entre dans le cadre de ces activités. »


Le commerce en ligne s’intéresse donc par sa nature à la notion d’activités dirigées vers un État membre.
Mais le règlement ne donne aucun exemple d’activité dirigé vers un État membre. Les commerçants électroniques sont face a une insécurité juridique, car ils ne peuvent pas prévoir avec précision quels sont les cas ou ils pourront être poursuivis dans d’autres états membres.
Dans un arrêt récent du 7 décembre 2010, la CJUE, réunie en grande chambre, a regroupé 2 affaires relatives à ce conflit de compétence et en a profité pour donner des exemples d’indices permettant de qualifier la notion d’activité dirigée vers un autre État membre :
nature internationale de l’activité
-la mention d’itinéraires à partir d’autres États membres pour se rendre au lieu où le commerçant est établi
-l’utilisation d’une langue ou d’une monnaie autres que la langue ou la monnaie habituellement utilisées dans l’État membre dans lequel est établi le commerçant avec la possibilité de réserver et de confirmer la réservation dans cette autre langue
la mention de coordonnées téléphoniques avec l’indication d’un préfixe international
-l’engagement de dépenses dans un service de référencement sur Internet afin de faciliter aux consommateurs domiciliés dans d’autres États membres l’accès au site du commerçant ou à celui de son intermédiaire
-l’utilisation d’un nom de domaine de premier niveau autre que celui de l’État membre où le commerçant est établi
– la mention d’une clientèle internationale composée de clients domiciliés dans différents États membres
Cette liste n’est pas exhaustive. Le juge national est tenu de vérifier ces éléments mais comme il s’agit d’indices, le juge reste libre quant à l’appréciation de leurs pertinences.
Le juge communautaire a également précisé les cas qui ne pouvaient pas servir d’indices pour qualifier la notion d’activité dirigée vers un état membre :
la simple accessibilité du site Internet du commerçant ou de celui de l’intermédiaire dans l’État membre sur le territoire duquel le consommateur est domicilié
la mention d’une adresse électronique ainsi que d’autres coordonnées ou de l’emploi d’une langue ou d’une monnaie qui sont la langue et/ou la monnaie habituellement utilisées dans l’État membre dans lequel le commerçant est établi

Remarques : Les indices sont censés relever la volonté du commerçant de diriger son activité vers un autre état membre.
Cette notion de volonté a été l’objet d’une attention particulière (point 63 à 69) dans cet arrêt notamment au sujet de la publicité.
Mais d’autres indices retenus par le juge européen ne traduisent pas nécessairement cette volonté du commerçant électronique de diriger ses activités vers un autre état membre, comme le choix du nom de domaine qui peut découler d’une indisponibilité ou d’une facilité d’enregistrement.
Le commerçant électronique devra faire attention lors de la création de son site à ces éléments s’il ne souhaite pas que ses activités soient considérées comme dirigées vers un autre état membre. Le but étant bien sûr d’échapper aux juridictions des autres États en cas de conflits avec un consommateur.
Sources:
Règlement (CE) n° 44/2001 du Conseil du 22 décembre 2000 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale
Arrêt de la Cour (grande chambre) du 7 déc. 2010 ,Peter Pammer contre Reederei Karl Schlüter GmbH & Co. KG (C‑585/08), et Hotel Alpenhof GesmbH contre Oliver Heller (C‑144/09).

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